Bu(cher)ffet campagnard avec Jean Teulé

Publié le par Agnès Séverin

Cocktail

                       

 

 Comment la barbarie peut s’emparer d’une foule en un claquement de doigt ? Jean Teulé, l’auteur du roman à succès Le Montespan l’an dernier, a répondu avec la même candeur et sa drôlerie habituelle à la question posée avant lui par un René Girard ou une Françoise Héritier (qui figurent à sa bibliographie). Un éminent historien, Alain Corbin, s’était déjà attaqué, de manière plus académique, à un fait divers qui défraya la chronique à la veille de la révolution de 1871.

 

Finesse, cannibalisme et fantaisie

 

   Le mari de Miou Miou à la ville fait ici preuve de la même légèreté, de la finesse et de la fantaisie, d’un même goût des beaux sentiments, que lorsqu’il évoqua la déception du marquis de Montespan face à son rival le Roi Soleil. Mais cette fois le contraste est encore plus violent entre la belle âme et le sort qui lui est infligé. Ce jour de foire à Hautefaye, l’incompréhension du jeune aristocrate périgourdin Alain de Monéys est totale face à des agresseurs qui sont ne sont autres que ses voisins, devenus fou par un fatal engrenage de misère, de violence, de peur, de guerre, de cruauté banale et de mimétisme ordinaire.



 

  Les éditions Julliard, qui recevait le 12 mai dernier au Loir dans la théière, un aimable troquet de la rue des rosiers, pour fêter la sortie du livre avaient disposé des petites ardoises sur les étagères. Sur l’une d’elles il était inscrit, innocemment, à la craie : « Il a bon goût ? ». Réponse : « On dirait du veau ». Quand on a lu ce roman doux acide, et que l’on sait que cette victime expiatoire de hasard a fini sur un bûcher… et dans les assiettes des paysans du cru, on imagine que, tout à coup, la terrine du buffet campagnard ait eu un peu de mal à passer.

 

  Les éditions Julliard ne manquent pas d’humour. Comme leur talentueux auteur, qui n’est que gentillesse et simplicité et laisse fuser régulièrement un rire aigu qui rappelle, de manière troublante, les petits marquis de Versailles (avec qui il n’a rien à voir, il n’est point besoin de préciser). L'éditeur sait aussi faire un bon plan de table.

 

Petits paris sur les prix d’automne

 

David Foenkinos et son ami Serge Joncour sont passés prendre un verre. Ils ont lancé, à cette occasion, le petit jeu des paris sur les prix. Après Nos séparations, son meilleur livre paru l’automne dernier (voir chronique dans les pages ci-dessous), David se (re)lance dans la course avec un nouveau titre, toujours chez Gallimard. « Peut-on gagner le Goncourt sans parler de l’Afghanistan ou de la Shoah ? », glisse-t-il, pas très très politiquement correct, en grillant, qui plus est, une petite cigarette sur le trottoir.

Et avec le calvaire d’un nobliau qui finit en saucisse ? Contrairement au jury de la Croisette, celui de Drouant pourrait par exemple jouer la surprise en récompensant en auteur de mai pour changer un peu. Non ?

 

 

  • Mangez-le si vous voulez de Jean Teulé
  • Julliard, 129 pages, 17 euros

   

          

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